21 h 15, Blood
Red Shoes rentrent sur scène, dans le noir. Steve, voix géniale (Feargal Sharkey
? Russell Mael ?) et batterie dantesque (John Bonham ? Keith Moon ?) est
toujours le même monstre déguisé en chérubin blondinet à la coupe de cheveux
juvénile. Laura-Mary Carter est toujours la même goule, renfermée, voire
renfrognée (la timidité ?), cachant sa beauté touchante derrière ses cheveux, et
sans doute responsable du manque d'éclairage récurrent des concerts de BRS :
même si elle mouline des riffs sanglants, même si sa guitare déversera un
torrent de lave ininterrompu durant l'heure qui suivra, il y a quelque chose de
refroidissant, presque de déprimant dans cette retenue. Blood Red Shoes me
posent un vrai problème, à moi : leur musique est quasiment parfaite - à mon
goût -, réalisant le premier cross-over vraiment parfait entre pop brûlante et
noise cataclysmique, conjuguant beautés vocales (bon, pas forcément mises en
valeur sur scène, avouons-le, le mix sacrifiant les voix de manière
systématique
!) et virtuosité technique. Pourtant, il semble toujours leur manquer ce soupçon
de folie, cette larme d'émotion qui ferait basculer leur musique vers l'hystérie
qu'elle semble convoquer vainement. Et le public du Trabendo ne s'y trompe pas,
qui reste relativement calme malgré le déluge sonore qui s'abat sur lui : tout
le monde connaît toutes ces chansons merveilleuses par coeur, mais nul n'arrive
vraiment à se laisser aller dans l'extase qui devrait nous submerger. Blood Red
Shoes jouent une musique impeccable, mais vaguement sans surprise, y compris dans
son intensité qui ne fluctue sans doute pas assez pour devenir saisissante...
Nous
aurons droit ce soir à trois nouveaux morceaux, dans la même lignée que les
pépites de "Box of Secrets", le plus beau étant le premier, "New Song" (titre
définitif ?), qui voit Blood Red Shoes s'aventurer plus franchement sur les
terres de Sonic Youth ou de My Blood Valentine. Le public finit quand même par
s'échauffer, au bout de cinquante minutes, sur "This is Not For You" et "I Wish
I Was Someone Better" : Laura-Mary sourit (un petit peu) enfin, Blood Red Shoes
rajoutent un peu de "spectacle" dans leur set, et le contentement nous saisit
enfin... Mais... c'est déjà fini !
Heureusement,
il va y avoir un rappel, et, pendant ce rappel, il va se passer quelque chose de
significatif : pour la première fois (?), Steve et Laura-Mary vont échanger
leurs instruments, et le Stevounet va se lancer, soutenu par Laura-Mary à la
batterie métronomique (mais correcte), dans un morceau "garage" du plus bel
effet : le voici, lui, rock star valstar, guitar hero rigolo, il saute dans tout
les sens, il y a une lumière nouvelle sur scène, même Laura-Mary a la banane
derrière les fûts, tous les spectateurs sont ravis. Rien à dire, Steve est un
(petit) dieu ! Et du coup, on entrevoit une possibilité de salut pour Blood Red
Shoes : l'échange des rôles, sinon des sexes. Allez, cachez la jolie grognon
derrière la batterie, mettez-nous le mignon souriant à la guitare, et tout ira
pour le mieux : on les appelera Sperm White Santiags, et on rigolera bien plus
!
Vous retrouverez, comme toujours, l'intégralité de ce compte-rendu sur le blog des Rock'n'Roll Motherf***s !