A voir l'organisation des micros et de l'amplification (limitée quand même),
Fredo Viola n'est donc pas seul sur scène ce soir, et ça, c'est
quand même une excellente nouvelle, quand on craint comme moi l'ennui des
récitals solos. En plus, la salle étant pleine, on est "obligés" d'être debout !
Je jubile intérieurement, et mes fesses et mes genoux sont soulagés ! Il y a
bien quelques protestations du public assis pépère derrière, mais c'est d'un
putain de concert de rock qu'il s'agit, non ? Fredo démarre seul avec son Mac,
pour un Moon After Berceuse, qui permet tout de suite de confirmer deux
choses : d'abord que la voix de Fredo Viola est bien aussi époustouflante - et
maîtrisée - que sur le disque, ensuite que si nous avions affaire à un récital
solo de ce type, avec empilage de voix synthétiques parfait, le niveau de
saturation serait rapidement atteint. Mais, comme prévu, dès le second morceau,
on change de dimension : Fredo présente son groupe, un trio anglais de
Manchester qui s'appelle I am Your Autopilot, auquel s'est
joint un drôle de lascar en salopette et pieds nus, un Français
multi-instrumentiste, plutôt du genre baba cool pas trop stressé (il a toujours
fallu l'attendre au démarrage de chaque nouveau morceau) !
Et immédiatement, le
concert décolle : remplacez les sons préenregistrés par une bonne vieille
combinaison guitare-basse-batterie, et les dizaines de Fredo Viola en boucle sur
le Mac par deux excellents chanteurs qui soutiennent le vrai Fredo, et vous
n'avez d'un coup plus affaire à une musique électronique parfaite mais un peu
autiste ! Non, ce soir, on voit l'avenir de Fredo Viola - car il en a un, au
delà du coup de force un peu geek de "The Turn" : revenir au bon vieux format
rock, et jouer ses compositions de musique savante comme s'il s'agissait de
simples pop songs ou de country-folk "normale" ! Car tout le monde y gagne, les
spectateurs en premier : ça tangue, ça swingue, ça enfle même parfois d'une
belle émotion (The Turn, plus sublime encore que sur l'album, The
Sad Song, en dernière place avant le -premier - rappel), mais ça reste
vocalement renversant ! Même les morceaux que je trouve plus faibles, comme
Red States ou The Original Man, avec ses paroles un peu
débiles sur la fascination féminine envers Nicolqs Cage et George Clooney, se
mettent à avoir un âme, et même à nous faire danser, frapper dans les mains,
sourire. Mais le mieux encore, ce sont les nouveaux morceaux, pas loin d'être
les meilleurs de la soirée (Revolutionary Son et Little Guy,
qu'ils s'appellent), plus directs, plus simples, plus... jouissifs
!
Et c'est le premier rappel, qui voit se succéder un nouveau
morceau en solo - dispensable, même si l'idée de chanter en "gibberish" (en
yaourt si on veut) est quand même assez sympathique, et surtout, surtout, une
sidérante version de Downtown, l'immortel hit de Petula Clark : à mon
avis, la version la plus extraordinaire que j'aie jamais entendue de cette
chanson reprise, rappelons-le, des dizaines de fois (Sinatra, Parton, mais aussi
The B-52's et The Comateens...). Après ce choc, ce grand frisson, impossible de
laisser partir Fedo et ses impeccables complices. Fredo, amateur jusqu'au bout
des ongles, et c'est tant mieux, vient nous expliquer, tout intimidé, qu'ils ne
savent pas jouer d'autres morceaux, vu qu'ils n'ont appris que ceux-là lors de
leurs répétitions à Manchester la semaine dernière : tant pis, il décide de nous
refaire et Red States, et The Original Man en version
"acoustique", c'est-à-dire, dans son jargon, sans aucune électronique, sans
l'aide donc du Mac.
Voilà, c'est fini, tout le monde est debout, et ravi, et les
musiciens apparemment encore plus que nous : 1 h 20 d'un concert tout-à-fait
inattendu, et bien supérieur à ce que j'en attendais...
Retrouvez l'intégrale de ce compte-rendu, et en particulier la première partie, Revolver, sur le blog des RnRMf !