"Copie conforme" permet de
confirmer ce que l'on avait suspecté lors du passage de Wong Kar Wai par les
Etats-Unis : même les grands cinéastes ne peuvent qu'y perdre à s'éloigner de
leur "territoire". Si l'on retrouve ici tous les composants de
"l'Art" suprême de Kiarostami (son filmage patient et juste, son
attention quasi surnaturelle envers ce qui se lit de l'âme sur le visage, et
bien entendu son talent redoutablement "wellesien" à faire basculer
spectaculairement sa fiction en jouant sur les apparences - ce qu'on voit n'est
pas forcément ce qui se passe...), la "formule" - qui reste
magnifique, attention ! - tourne à vide : l'utilisation de l'art comme
commentaire de la vie amoureuse est peu convaincant, le drame du couple
"bourgeois" occidental reste banal, Binoche semble régulièrement
fausse, mal à l'aise sans doute face à l'attention qui lui est portée, et au
final, la conclusion suspendue est ici plus un aveux d'impuissance qu'un geste
stylistique : "Copie Conforme" aurait au contraire gagné à se
conclure de manière plus "kiarostamienne", soit en inscrivant son
couple déchiré dans la beauté des paysages italiens, soit en redonnant un
"twist" fictionnel qui permette une nouvelle remise en perspective de
sa narration. Dommage !
27 décembre 2010