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Le journal d'un excessif
11 mars 2009

Jay Reatard au Point Ephémère le mardi 10 mars

2009_03_Jay_Reatards_042Quand le trio de Jay Reatard monte sur scène, on a quand même un peu peur : serait-ce Spinal Tap live pour nous ce soir ? Des tignasses de hardeux, des carrures de buveurs de bière au tonneau pour le guitariste-chanteur (blond ; nous ne verrons quasiment jamais son visage...) et le bassiste (brun ; il ne quittera quasiment plus son rictus dément jusqu'à la fin de la soirée), des guitares Gibson Flying V qui semblent sortir tout droit d'un cauchemar du début des années 80. On craint un moment du vieux hard rigolo pour "attardés" (cf. le nom du groupe), et on reste sidérés par l'attaque au lance-flammes de Jay Reatard : c'est du punk, et du vrai, du pré-77 même, mais joué avec des postures "headbangers de la mort", un peu comme si les Dictators (pour ceux qui se souviennent des Dictators...) avaient été contemporains des Ramones. Hallucinant ! On se croirait dans un film des Frères Farelly, mais des Frères Farelly défoncés au speed et lancés à fond en sens inverse sur une autoroute bondée. Il ne faut pas plus de deux morceaux pour que le Point Ephémère soit transformé en une indescriptible arène où les gladiateurs s'affrontent en hurlant et en dansant un pogo qui nous ramène brutalement 30 ans en arrière : on se protège des coups qui volent, mais le tout reste bon enfant (si ! si ! - un spectateur extatique me confiera 45 minutes plus tard que nous avons eu de la chance, les musiciens ayant apparemment l'habitude 2009_03_Jay_Reatards_055de descendre dans la salle chercher le coup de poing... pas sûr quand même que ça ne soit pas une légende, ces types me paraissant complètement allumés, mais assez pacifiques...!). Je jette un coup d'œil à Gilles, à côté de moi, son visage respire le bonheur, en alternance avec une franche hilarité. Je suppose que moi aussi, je dois avoir la super banane, car d'un coup, tous mes soucis se sont envolés. Ne reste que la satisfaction totale de ces morceaux à cent à l'heure, puis à cent cinquante, puis à deux cent... entrelardés de solis stridents et démentiels pour leur ajouter une touche semi-parodique. Car ce qui est très fort, c'est que Jay Reatard conjugue de manière indiscernable premier (la brutalité) et second degré (la parodie, donc) : au lieu des Frères Farelly, on est plutôt dans une comédie de Judd Apatow, finalement, avec des nerds bêtes et méchants mais qui finissent par nous en dire plus sur notre vie que bien d'autres groupes qui se prennent tellement au sérieux. J'ai une pensée émue et chagrinée pour les pauvres qui en ce moment même, sont en train d'applaudir Doherty (gerbe...) en solo, pas loin de là. Et puis, je les oublie, ces sinistres victimes de la mode, j'essaie d'éviter les glaviots du bassiste déchaîné, et aussi de trop me faire arroser par les litres de sueur en gouttelettes pulvérisées par les tignasses qui s'agitent rythmiquement à deux mètres de nous.

Et là, envers et contre toute attente, le concert monte en intensité, les chansons deviennent plus speed encore, les enchaînements entre deux morceaux se transforment en une simple scansion, marquée par un 2009_03_Jay_Reatards_060hurlement du chanteur avant la reprise du martèlement furieux du batteur rondouillard et binoclard qui ne paye pas de mine. Impossible de me pas évoquer l'esprit des Ramones, donc, devant ce tir de barrage : le son monte - pas encore aussi fort qu'on l'aurait aimé, mais enfin, ça commence à bastonner sévère les oreilles -, le chanteur pose sa guitare en plein larsen, descend comme un furieux dans la salle... moment de flottement... Il a empoigné un pauvre spectateur par le col, le traîne sur la scène pour qu'il empoigne la guitare abandonnée, pour pouvoir quant à lui se consacrer à hurler comme un damné dans son micro. A ce moment-là, je crois que tout le Point Ephémère est en train de hurler en même temps... Le rappel est une tuerie sans nom, on ne discerne plus rien tant le pilonnement de l'artillerie et le grondement de la basse (Lemmy, tu aurais aimé ça si tu avais été là...!) balayent les dernières velléités de résistance du public. Le chanteur quitte la scène, la rythmique termine seule le concert, c'est trop beau ! Soudain, le bassiste fou pose sa basse, éteint d'un coup sec les amplis, créant d'un coup un silence assourdissant, empoigne son sac à dos et se jette dans la foule : voici bien la sortie de scène la plus culottée que j'aie jamais vue !

Ouaouh ! Punk rock is alive and well ! Rock'n'Roll will never die ! etc. etc. On n'a pas envie de quitter le Pont Ephémère après ça, et tout le monde s'entasse avec enthousiasme devant le stand de merchandising, s'arrachant t-shirts et albums... Voilà, c'était sans doute l'une des meilleures soirées rock'n'roll que j'aie vécues depuis des années. C'est simple : ce soir, il fallait être au Point Ephémère pour vivre ça !

Pauvre Pete Doherty !

Retrouvez l'intégralité de ce compte-rendu sur le blog des Rock'n'Roll Motherf***s !

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